La vie de Muhammad - T3 by Hichem Djaït

La vie de Muhammad - T3 by Hichem Djaït

Auteur:Hichem Djaït [Djaït, Hichem]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Biographie
Publié: 2012-07-17T22:00:00+00:00


On les a accusés d’accointances avec les Juifs. C’est fort possible, ce qui pourrait expliquer leur grande proportion chez les Aws, eux aussi proches des Juifs. Mais je crois que leur apparition est due à l’influence de personnalités connues et respectées d’une certaine classe d’âge – les Anciens – qui avaient eu un passé préislamique. Et si les sources – Sirās et Balādhurī – ont retenu en tout vingt-huit noms pour toute la période prophétique avec les évolutions qu’elle a connues, sans doute traînaient-ils derrière eux quelques dizaines ou plus d’anonymes. Dans l’ensemble, c’était un groupe faible, ne représentant aucun réel danger pour le Prophète : la preuve en est qu’ils durent s’islamiser sous la pression de leurs congénères arabes, et, après Uḥud et surtout Khandaq (an 5), participer aux expéditions6, mais ils provoquaient, par leur attitude de « douteurs » et de critiques, une fissure dans le corps homogène de la Umma. Or le Prophète, dans les cinq premières années, avait déjà à affronter l’opposition – totale, elle – des Juifs, sans compter un grand nombre d’Arabes restés païens, réfractaires à l’islam et très proches des Juifs. Et l’atmosphère était à l’extérieur à la guerre contre Quraysh, le conflit premier et de loin le plus important.

Il est frappant que le discours coranique ne s’attaque pas au gros groupe des païens arabes, les Aws-Manāt, tandis qu’après les Juifs ce furent les hypocrites qui s’attirèrent les plus nombreuses attaques. C’est que les Aws-Manāt ne participaient pas à la vie des croyants. Ils étaient loin, dans la ‘Āliya orientale, voisins des Juifs Naḍīr et Qurayẓa, et subissaient leur influence7 ; ils étaient loin physiquement et moralement, alors que les hypocrites, croyants de façade, étaient mêlés à la vie de la communauté et pouvaient y instiller leur venin : ils côtoyaient les fidèles et le Prophète lui-même, ne donnaient pas l’apparence extérieure d’ennemis ou d’indifférents, mais comme de dangereux subversifs. Du point de vue musulman, ils sapaient en profondeur le travail du Prophète, lequel ne pouvait rien contre eux, d’abord parce qu’ils se faisaient passer pour croyants, ensuite parce qu’ils appartenaient à des clans arabes très majoritairement musulmans et que s’en prendre à eux eût éveillé le mécontentement de leurs congénères parmi les Anṣār, ainsi que de vieux sentiments de solidarité clanique, et pouvait mettre en danger la pax islamica. D’où la dualité entre le discours coranique, d’un côté, sévère à leur encontre, et la passivité du Prophète dans l’action réelle contre eux, de l’autre.

Cette épine dans le pied, Muḥammad devait l’endurer presque jusqu’à la fin8. Outre les dangers évoqués plus haut, ceux-ci bien réels, y avait-il à leur endroit une susceptibilité prophétique, qui s’expliquerait par le fait que Muḥammad supportait mal la critique, l’opposition, la dénégation, la non-obéissance ? M. Watt parle d’un autoritarisme certain de la part du Prophète, d’une nette tendance à faire taire toute forme d’opposition. C’est vrai si l’on considère les choses d’un pur point de vue politique. Après Badr, on l’a vu, il y a eu des assassinats, essentiellement de Juifs et de poètes satiriques païens.



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